Qu’est-ce qui motive les entreprises à avancer vers la durabilité ? 

26 mars 2024

Qu’est-ce qui motive les entreprises à avancer vers la durabilité ? 

Simon Sinek affirme « Start with Why”. Commencez par le pourquoi.
Et c’est une question que Viva se pose tous les jours : Pourquoi les entreprises s’engagent sur le chemin de la durabilité ? (Et comment leur tendre la main)

Lors d’une rencontre des prestataires qui accompagnent au quotidien les entreprises vers la durabilité, nous avons posé la question. « Pourquoi vos clients se sont engagés sur le chemin de la durabilité ? ». Ce texte a été rédigé sur la base des échanges suscités par cette question

Un positionnement stratégique

Avancer vers la durabilité : une opportunité de positionnement stratégique. 

Pour certaines entreprises, entrer dans une démarche de durabilité a permis de définir un nouveau positionnement, plus solide et différenciant.

Pour TSI, une entreprise qui fabrique des systèmes de sécurité pour les cadenas des valises, l’innovation n’était pas là où on l’attendait. Un bilan carbone a révélé que la plupart des émissions avaient lieu sur la chaîne de valeur mais en dehors de leur contrôle direct. Donc l’entreprise avait peu de moyens d’actions directes mais paradoxalement, elle était à une position d’interface stratégique dans l’industrie du bagage qui lui permettait d’aborder tous les acteurs sans jamais être leur compétiteur direct. L’entreprise est devenue leader de la discussion et s’est positionnée sur le soutien à l’innovation dans le secteur du bagage. Cela a renforcé sa relation avec ses clients.  

L’entreprise Loyco propose des services administratifs et a intégré la durabilité comme un élément identitaire qui a permis une différenciation forte dans un secteur concurrentiel. Les fondateurs sont régulièrement conviés à s’exprimer publiquement sur leur engagement, ce qui les place en leaders du sujet. 

La durabilité comme boussole

La durabilité comme boussole : une aide à la décision.

Lorsqu’une démarche de durabilité est mise en place, certaines options n’en sont plus. Certains critères restreignent les fournisseurs possibles. Les choix stratégiques sont plus faciles. Cela représente un gain de temps pour le management. Cette efficience et cette agilité sont précieuses pour les entreprises qui ont passé le pas. La gouvernance et l’adhésion du conseil d’administration s’en trouvent améliorés. 


Pour les équipes, il est aussi plus facile d’expliquer les choses. L’exemple est souvent cité pour le domaine de l’hôtellerie-restauration. L’adhésion à un label par exemple, amène une compréhension homogène des enjeux de la durabilité au sein de l’entreprise. Au quotidien, il s’effectue un gain de crédibilité auprès des clients qui lui-même engage un cercle vertueux : plus de visibilité et un réseau à la fois plus large et plus qualifié. 

Image et valeurs

Une question d’image et de valeurs.

La durabilité sourit aux audacieux. Ceux qui se lancent sur le sujet sont pionniers et ça leur donne la possibilité de changer de place sur l’échiquier de leur secteur, à l’instar du « petit » musée d’Ethnographie de Genève qui, en démarrant sa démarche RSE est devenu une référence internationale en matière de durabilité, au point d’être appelé à l’étranger pour témoigner de sa démarche lors d’une table ronde. 

Il se dit aussi qu’un projet RSE donne du sens au travail, aux collaborateurs et collaboratrices. Dans les faits, les choses ne sont pas si limpides. Il y a aussi des réticences au changement. 

Gestion des risques

La durabilité sous l’angle de la gestion des risques.

Passer la durabilité sous silence implique certaines prises de risques.
Comment transmettre ou revendre une entreprise qui n’est pas durable ?  Comment maintenir son attractivité ?Une démarche RSE implique souvent une certaine ouverture, parfois une transparence sur certains éléments chiffrés. Cette transparence amène beaucoup de crédibilité auprès des clients. C’est ce point que Wikimedia avait l’intention de valoriser pour rendre ses relations avec investisseurs et banques plus durables. La transparence a non seulement amélioré l’image de marque et fidélisé les donateurs mais a également protégé l’organisation du risque réputationnel sur la question de la gouvernance. 

Le jeu des contraintes

La durabilité initiée par la contrainte et/ou la pression des clients.

La contrainte législative ou l’anticipation de la contrainte peuvent induire (et c’est leur vocation), le démarrage d’une démarche en durabilité. Par effet rebond, la demande des entreprises-clientes, notamment les multinationales qui ont pour la plupart déjà pris des engagements sur le sujet de la durabilité, entraîne de nombreux sous-traitants dans son sillage. 

 
Distal Motion, une entreprise qui crée des robots chirurgicaux, devait pouvoir fournir un chiffre et un plan d’actions concernant ses émissions de gaz à effet de serre à un client basé en Angleterre pour donner suite à une contrainte du NHS (National Health Service) anglais. Cette contrainte a initié la démarche. La directive sur les rapports de durabilité des entreprises (CSRD) va également œuvrer dans ce sens. Elle concerne plus de 50'000 entreprises en Europe qui vont toutes faire des demandes à leurs fournisseurs. 


L’entreprise Ocsial fabrique des nanotubes de carbone et anticipe la conformité : ils ont engagé une démarche d’accompagnement avec la condition que les résultats soient publiables et compatibles CSRD. 

La contrainte revêt un effet domino car elle se répercute sur la chaîne de valeur et sur les fournisseurs. Pour rester éligible à certains appels d’offres, notamment sur les marchés publics, il faut montrer patte blanche. 

C'est ce qui a amené le bureau DIC SA Ingénieurs vers une démarche certifiante. Ayant perdu un appel d'offre pour faute de preuve (certifications) en termes de durabilité, l’entreprise a décidé de formaliser ses engagements en durabilité en passant la certification EcoEntreprise reconnue dans les appels d'offres publics.

Il faut relever également que des acteurs s’engagent de manière plus affirmée. A l’image de l’horloger Audemars Piguet, qui a non seulement demandé à tous ses fournisseurs de se conformer à des critères RSE exigeants mais aussi accompagné toute la filière dans sa transition, opérant ainsi une montée en compétences de toute la branche. 

Un trésor inattendu

Un trésor inattendu au cœur des approches collaboratives

La collaboration est une tendance forte qui est observée, notamment lors des appels à projets collaboratifs du fonds de soutien à l’économie durable. Comme le décrivent les récits de ces expérimentations https://www.viva-vaud.ch/fr/succes/type-soutien/projets-collaboratifs-durables/, les liens qui se tissent autour du projet ont des effets à long terme et influencent la manière dont les entreprises perçoivent leur rôle dans le tissu économique. 

Pour reprendre l’exemple d’Audemars Piguet, les résultats sont allés bien au-delà de l’intention. Initialement, tous les fournisseurs ont travaillé ensemble sur les questions de mobilité, puis une dynamique de communauté s’est créée et elle a permis d’identifier des économies d’échelles, d’élaborer des solutions à des problèmes de ressources concernant les métaux précieux. Le trésor inattendu de la transition est l’ouverture à des formes de collaboration qui amènent de la valeur sur beaucoup d’autres sujets.

La démarche ira-t-elle au-delà de la contrainte ? C’est là que le pouvoir du « Pourquoi » prend son sens et que le talent du prestataire dans sa capacité à faire entrevoir les opportunités entre en jeu.

Un sésame - Des sésames

La durabilité, sésame pour accéder à de nouveaux mondes

The Ocean Race est une course à la voile autour du monde comme il en existe plusieurs. Mais son engagement sur le chemin de la durabilité a ouvert de nouvelles perspectives. L’engagement était réel : réduire l’empreinte plastique de l’événement, s’associer à un programme scientifique d’outils de mesures de données océanographiques, mettre en œuvre un programme pédagogique qui a touché 250'000 enfants dans 10 pays parmi d’autres actions. Les retombées ont aussi été très concrètes ; 7 récompenses internationales, une valorisation dans les médias, l’attention de nouveaux sponsors (financements) et de philanthropes, l’accès à de nouvelles lignes de financements grâce à une approbation de l’ONU. Au total, une moisson qui a permis de faire grandir l’équipe de 10 personnes à temps plein et d’accroître la valeur intrinsèque de l’organisation. 

A contrario, il a été relevé lors des échanges qu’une durabilité « de surface » ne tenait pas le choc de la réalité et apportait peu de bénéfices. Sans implication convaincue, notamment du conseil d’administration, l’entreprise est davantage exposée au risque réputationnel. La durabilité doit s’inscrire dans les valeurs de l’entreprise.   

En conclusion, les raisons pour lesquelles les entreprises s’engagent vers davantage de durabilité sont multiples, parfois évidentes, parfois tout à fait inattendues et dans le fond, toutes sont valables. La seule chose dont nous sommes sûr, c'est que demain sera très différent d'aujourd'hui et que la durabilité en fera partie. L’enjeu est de ne pas rester en surface et d’accéder aux autres motifs, au levier du collaboratif, à l’innovation. Cet ancrage peut être facilité par le prestataire qui accompagnera la démarche. Voyons grand ! 

Article rédigé collectivement lors de la rencontre des prestataires de la durabilité organisée par Viva le 30 janvier 2024.
Etaient présents: Géraldine Fiol de Besustainaball ; Isabelle Cohen Solal ; Delphine Avrial ; Anne-Cecile Turner de BloomUp ; Marine Manche de e-a.earth ; Alessandra Chezzi de Loyco ; Oriane Jobin de Alterna.eco ; Virginie Toral de PME Durable ; Neslia Hermann de Hdurable ; Katell Bosser et Yves Loerincik de Viva